S'auto-publier : le fanzine (partie 1)
from Blog de Patate
On va commencer par se mettre d'accord sur la terminologie, parce que le fanzinat par définition c'est un peu le fait de s'auto-publier. Et même ça c'est un peu un abus de langage, parce que comme son nom l'indique, à la base le fanzine c'est un magazine de fan, celui qu'il ou elle fait elle-même, pour parler des concerts et disques de ses groupes punks préférés, par exemple. C’est fait avec peu d’argent, donc pas mal avec les moyens du bord, au point que le mode de réalisation va se confondre avec sa vocation pour définir le média, ce qui fait qu’aujourd’hui, et ça ne va peut-être concerner que moi, quand je pense à un fanzine, je pense à ça :
C'est le format le plus usité pour cette pratique : le petit magazine imprimé en noir et blanc sur la photocopieuse de son syndicat étudiant. Le papier a pris l'humidité dans le local que la fac a bien voulu laisser à disposition, les aplats de noir sont pas ouf, pour ne pas dire dégueulasses, l'équilibre des marges n'a jamais été configuré, ptn y a plus de toner dans la machine, t'as les clés du placard toi ? Mais on s'en fout parce que ce qui est trop bien, c'est qu'on l'a fait soi-même, sans dépendre de la validation éditoriale de qui que ce soit, et que ça a coûté que dalle.
Je propose qu'on voie ensemble comment s'auto-publier sous cette forme précise, celle de ces bonnes vieilles feuilles A4 qu’on plie en deux et qu’on agrafe la veille du concert, du festival ou de la manif. Ça peut concerner n'importe quel contenu : bande dessinée et essai politique pour les plus répandus, mais on peut en faire ce qu'on veut (nouvelles, journal, recettes de cuisine, musique, cinéma, tout ce qui s'écrit, se dessine et veut être partagé).
Techniquement, de quoi on parle ?
On parle d'une impression en mode brochure (ou mode livret, booklet en anglais) format A4 ouvert, A5 fermé, piqûre à cheval deux points métal. Plus grossièrement, il s'agit d'imprimer plusieurs pages demi-format recto-verso dans un certain ordre (on verra ça un peu plus tard) pour qu'on se retrouve au final avec des feuilles A4 qu'on n'a plus qu'à plier en deux ensemble, on bouère deux agrafes en plein milieu et paf ça fait des chocapic.
Est-ce que ça va influer mon contenu ?
Oui. De la même façon que le CD et ses 45 minutes pour calmer les ardeurs des groupes de post-rock, que la pellicule de projection pour où c’est qu’on met les fondus au noir dans les films, l'impression en mode brochure va imposer certaines limites physiques, essentiellement sur le nombre de pages, avec ces deux contraintes :
- votre création devra avoir un nombre de pages qui soit un multiple de quatre. C'est hyper-méga-turbo important, obligatoire même. C'est en effet une contrainte physique du support, pour la raison simple que si vous prenez une feuille de papier et que vous la pliez en deux, vous obtenez quatre pages, et pas trois ni cinq.
Au pire, vous pouvez toujours tricher en ajoutant des pages blanches pour arriver à ce multiple. En édition il est de toute façon normatif que la page 2 (le verso de la couverture, appelée deuxième de couverture) soit vierge, par exemple. Les pages de fin également. C'est un peu tricher oui, mais n'avez-vous jamais acheté ces agendas avec toute une floppée de pages à carreaux ou à lignes intitulées “Notes” à la fin ? Ce sont des gens qui se sont retrouvés confrontés à ce genre de contraintes de reliure et qui ont fait du remplissage.
le grand maximum de pages à lire sera de 100. Et encore c'est abusé. Cent pages, ça 25 feuilles imprimées recto-verso. Si vous avez du papier destiné au recyclage chez vous, essayez de plier 25 feuilles ensemble d'un coup : c'est raide. C'est pour ça que c'est une limite qu'on retrouve dans les modules de finition robotisés des machines de reprographie : au-delà de 25 feuilles, la machine dit non, met la tâche d’impression dans les travaux finis sans avoir rien sorti, fait grève sans préavis et va craquer des fumigènes place de la République.
ok loulou, je fais comment ?
La création du contenu
Ben vous écrivez, dessinez, mettez en page. Utilisez le logiciel que vous voulez. Traitement de texte, PAO, logiciel libre, votre abonnement Office 365, on s’en fout. Ça va être l’étape de la création, donc clairement moi à ce moment-là je dégage. La création c’est votre affaire donc le ou les outils qui vous mettent à l’aise aussi. Je donnerai seulement ce solide conseil en amont s’il s’agit de texte et/ou de mise en page : travaillez au format fini. Si vous imaginez que votre fanzine au format fini, plié, sera en A5, ne travaillez pas sur le format A4 ou Letter proposé par défaut. Le A5 est un vrai standard de papier, répandu, il ne sera pas difficile de le trouver dans les paramètres de page de LibreOffice ou autre. Cela vous évitera la mauvaise surprise de la lisibilité pas folle des caractères ou des marges un peu limite une fois imprimé à 70% de ses dimensions. Également, ne vous souciez pas de l’ordre d’assemblage de vos feuilles, travaillez dans l’ordre de la lecture souhaité, comme n’importe quel document.
Vous avez fini ? Cool. Ça fait quoi, 20 pages ? Ok. Deux suites possibles s’offrent à vous :
Choix 1 : je vais aller à la boutique de reprographie de mon quartier
Ben là, rien à faire. Vous exportez votre travail en PDF et vous y allez. Pas de bidouille supplémentaire à prévoir sur votre document : les ateliers de repro sont équipés de logiciels et de scripts d’imposition qui permettent en quelques clics studieux de mettre les pages dans le bon agencement pour que la machine fasse le reste, et le fanzine sort déjà plié et agrafé. L’impression noir et blanc, ce n’est pas cher, la finition piqûre à cheval normalement ce n’est pas facturé, c’est bon plan.
Choix 2 : je veux imprimer moi-même
C'est tout à fait possible, et tout à fait amusant. Pour cela, rendez-vous à la deuxième partie.
Bisous !